Zinder
La ville de Zinder (ou Damagaram), chef-lieu de la région qui porte le même nom, est la deuxième plus grande ville du Niger, située à l'est du pays sur une ancienne route commerciale de caravanes trans-sahariennes qui relie le Maghreb à l'Afrique Noire, dès le XIe siècle.Zinder présente un riche patrimoine à sauvegarder, d'histoire, de traditions, d'architecture et d'objets. Le quartier muré était la capitale d'un État musulman entre le XVIe et le XIXe siècle.Zinder fut conquise par les Français en 1899 sous le règne du sultan dan Tanimoune (Amadou Kourandaga) et fut la scène d'une tentative vaine des Touaregs pour reprendre le pouvoir contre les Français durant la Première Guerre mondiale.La ville a bien grandi pendant la première moitié du XXe siècle, quand les nomades de la région commencèrent à s'y installer. Entre 1922 et 1926, Zinder est la capitale de la colonie française au Niger.Pour ses habitants, la ville garde toujours le nom de Damagaram : nom qui appartenait (et appartient encore) au village originaire de la région et qui identifie aussi l'ensemble du territoire du Sultanat homonyme. Elle possède son petit aéroport et est reliée à la capitale du Niger (Niamey) par une route de 1 000 km. Zinder est actuellement érigée en communauté urbaine de 5 communes, suite à la Loi de décentralisation, abritant plus de 250 000 habitants.
L'HISTOIRE DE LA PAROISSE STE.THÉRÈSE DE L'ENFANT JÉSUS
1919
: Première visite à Zinder
La carte géographique religieuse du Niger de cette époque n'est pas celle que nous connaissons aujourd'hui. Zinder est rattaché à la Prefecture Apostolique de Shedam au Nigeria. Niamey fait partie du Vicariat Apostolique de Ouidah au Dahomey d'alors, actuel Bénin. Agadez est relié au Vicariat Apostolique de Khartoum (Soudan. Shedam et Ouidah sont sous la juridiction des Pères de la Société des Missions Africaines et Khartoum sous celle des Pères Comboniens.
En 1911, Monseigneur Oswald Waller, SMA, devient Préfet Apostolique de Shedam (Nigeria. Le jour de sa nomination à Shedam, il avait promis : "je voudrais préparer les voies du Seigneur en prêchant l'Évangile le long des routes jusqu'à Zinder". En 1919, il est en visite à Kano. La population de Zinder lui fait savoir son intention de le recevoir dans le Damagaram (Zinder). Cet Alsacien, robuste et de grande taille, prend alors la route de Zinder avec une très grande joie, réalisant ainsi ses propres promesses. Parlant parfaitement le haussa, il n’a aucune difficulté à entrer en relation avec les habitants de Zinder qui lui demandent d'ouvrir rapidement une mission dans leur ville. Il passera une semaine à Zinder. "C'est en mai 1919 que Zinder eut la première visite d'un prêtre catholique".
Mgr Waller écrira au très Révérend Supérieur Général de la Société des Missions Africaines: "Il faut que je m'en aille vite, sans quoi je céderai à la tentation de vivre et de mourir sur les sables brûlants de Zinder. Le thermomètre monte très haut ici, mais comme la chaleur est sèche, on la supporte très bien."
1925
Le 3 mai 1925, la mission catholique de Kano est inaugurée. Zinder s'y rattache comme station secondaire. Le Père Alphonse Shall, SMA, fidèle collaborateur de Mgr Waller depuis 1909 devient curé de 10. C'est à ce titre qu'il visitera Zinder dès novembre 5. La population européenne le presse d'ouvrir une mission catholique "... mais on ne pouvait pas disperser petites forces, on n'avait que trois missionnaires". Le Père Shall promet aux Zinderois de venir chaque année.
1926
Zinder est à cette époque depuis de nombreuses années "Chef-lieu" du "Territoire militaire du Niger". Ce territoire deviendra "Colonie" par la volonté du gouvernement général de l'Afrique Occidentale Française D.F.). Niamey, plus proche de la côte que Zinder, deviendra la métropole de la Colonie. Les principaux : centres de la Colonie sont à cette date : Zinder avec 5.900 habitants et Matankari avec 6.300 habitants. Les rapports officiels ne parlent guère de Niamey qui n'est qu'un petit village de pêcheurs, mais qui prendra de plus en plus importance.
1927
Monseigneur Waller, Préfet Apostolique de Shedam donne sa démission. Le Père Shall est nommé Pro préfet de la Préfecture Apostolique du Nigeria Oriental.
1936 : Visite romaine à Zinder
Zinder recevra un prêtre venant de Rome en inspection. Le Révérend Père Joseph Capra, professeur de Géographie Pratique à l'Université, va vivement critiquer le Père Shall, curé de Kano (Nigeria) qui n'avait pas encore envoyé un prêtre en permanence à Zinder. Cet étranger "en tournée de vacances voyageant gratis 1 ère classe" ignorait que la paroisse de Kano était plus grande que la France et qu'elle n'avait que deux prêtres seulement.
Depuis sa maison de retraite, le Père Shall qui n'a jamais digéré ces remarques romaines écrivait : "J'avais à visiter trente neuf paroisses, quatre fois par an et l'autre confrère le Père Eugène Sirlinger venait d'ouvrir onze écoles... il les visita tous les quinze jours, certaines écoles étaient à cent quatre vingt kilomètres de Kano. Il y creva bon nombre de chevaux, s'y usa jusqu'à la corde... puis nous vient un gros, gras, court prêtre de Rome pour nous dire qu'on ne fait rien. Merci du compliment".
Le Père Maxime Chazal, prêtre de la Société des Missions Africaines est nommé au Vicariat Apostolique de Ouidah pour la mission de Fada N'Gourma où il arrivera le 7 décembre. Il a fondé les missions d'Anécho et de Mango au Togo. C'est le premier prêtre résidant à Fada N'Gourma. Le Père Faroud se réjouit d'avoir un voisin même s'il est à 300 Km, il se sent moins seul. En 1898, des prêtres de la Société des Pères Blancs avaient séjourné à Fada N'Gourma pendant six mois dont le Père Yacouba, ami fidèle du Père Faroud dans sa vieillesse. Ils quittèrent bien vite la ville gourma lorsqu'ils se rendirent compte qu'il n'étaient pas dans leur territoire. Ce territoire était confié aux Pères des Missions Africaines. Ils se retirèrent dans le leur, à Ouagadougou. Le Père Slaterry, Supérieur Général SMA, écrit en décembre au Cardinal Fumasoni pour remettre officiellement la "demande d'une Préfecture Apostolique qui porterait le nom de Niamey".
Le Père Slaterry avait déjà choisi le nom du futur Préfet Apostolique. Il le présente pour confirmation au Cardinal avec beaucoup de diplomatie : "Nous avons indiqué celui que, tout bien considéré, nous préférons, laissant en toute soumission le choix définitif à la Sacrée Congrégation de la Propagande". Le Père Slaterry profite de cette même lettre pour demander le rattachement de Zinder à la nouvelle "future" Préfecture Apostolique de Niamey.
1939
Le 1er janvier, le Père Quillard, Rédemptoriste reçoit la visite de son Provincial à Alger avec qui il met au point son voyage à travers l'Afrique noire. Il contacte les intéressés : Mgr Nouet à Ghardala, Père Shall à Zinder, Père Faroud à Niamey, Père Chazal à Fada N'Gourma, Mgr Thévénoud à Ouagadougou, Mgr Parisot à Ouidah. "Le Niger appartenait à tous ces chefs de missions... il faudrait ajouter Khartoum mais impossible de l'atteindre". Le 2 septembre à minuit,"un fou : Hitler" déclare la guerre à toute l'Europe. Les Anglais rentrent en guerre le 3 septembre à 11 heures et les Français à 17 heures.
C'est le début de la deuxième guerre mondiale. Le Père Chazal est convoqué à Niamey. Lieutenant de réserve, il est affecté à Zinder. "La guerre arrive. Je suis déjà vieux mais mon titre d'officier de réserve me vaut de reprendre l'uniforme." La population de Zinder se réjouit de l'arrivée du prêtre-officier et voudrait tout de suite une église et une mission. Le Père Maxime Chazal lance par circulaire un appel pressant à la population européenne pour collecter les fonds nécessaires à la construction de l'église. En parlant de Sainte Thérèse de l'Enfant Jésus, patronne de la future mission de Zinder, il écrivit : "Celle que nous appelons la petite fleur, nos amis les Anglais : The Little Flower, le pape défunt : ma petite sainte, toute l'Eglise ; La Patronne des missions, cette aimable sainte, si invoquée par nos soldats pendant la guerre 1914-1918 et qui s'incline à nouveau vers eux dans la présente guerre, aura, grâce à nos petits sacrifices, un sanctuaire à Zinder, face au grand Sahara. Nous y viendrons le dimanche, prier pour nos soldats, pour ceux qui ne sont pas encore dans la lumière et nous en sortirons nous-mêmes, meilleurs et réconfortés. Nous y viendrons aussi, un jour prochain, y chanter le TE DEUM de la Victoire".
Le Père Lieutenant Chazal, malheureusement ne restera pas longtemps à Zinder. Il sera affecté par les autorités militaires à Niamey. Zinder n'a plus de prêtre. La population, loin de se décourager, écrira au Supérieur Général de la Société des Missions Africaines : "Le Père Chazal, sur la demande des catholiques de la ville de Zinder, européens et indigènes, militaires et civils, a choisi un endroit pour la construction d'une église. Il a ouvert une souscription qui avait déjà recueilli 6.000 Frs. Au mois d'octobre, les briques et les bois de coquaire sont à pied d'oeuvre avec des poutres métalliques. L'église pourra être construite à Noël. Il a tout notifié au Père Shall pour le transmettre au Préfet Apostolique de Kaduna".
Le Supérieur Général SMA, le Père Slattery, très touché par la mobilisation des Zindérois écrira en anglais au Père Shall de bien vouloir se mettre à l'oeuvre de Zinder. Il écrivait en même temps au Préfet Apostolique de Kaduna, Mgr Thomas Hugues de "bien vouloir céder ce Père".
1940 : L'église de Zinder est ouverte
Le Père Shall qui parlait français fut tout désigné pour aller à Zinder et y rester. C'est le 1er janvier qu'il fit ses adieux à ses paroissiens de Kano et il quitta ce territoire auquel l'attachaient tant de souvenirs chers à sa vie missionnaire.
Monseigneur Hugues, Préfet Apostolique, lui souhaita avec un beau sourire : "bon courage et la bénédiction du ciel". Il lui donna tout de même une pierre d'autel pour célébrer la messe et un vieil ornement blanc. "Voilà pour commencer... de l'argent je n'en ai point, usez de vos ressources et de votre imagination". C'est en pleine deuxième guerre mondiale que le Père Shall arrive à Zinder, heureux de recommencer à écrire une autre page de sa vie missionnaire : "Malgré mes trente et un an de mission, on me fit l'honneur d'en être le bâtisseur". Zinder ainsi que Myrriah et Tessaoua abritaient, à l'époque, beaucoup de soldats français dont certains de très bons chrétiens et "beaucoup d'autres, hélas, très indifférents. Chose étrange, les uns et les autres, surtout les derniers m'aidèrent de leur mieux. En France, ils n'avaient pas estimé le Bon Dieu, mais ici, dans ces immensités, dans ces vastes espaces, ils sentirent leur coeur se serrer d'inquiétude et cherchaient de la consolation dans le christianisme et dans l'assistance à la sainte messe". Deux officiers de Myrriah deviendront, par la suite, prêtres.
Rome avait donné au Père Shall, juridiction ordinaire jusqu'à El Goléa au Nord (2500 Km) en Algérie et à l'Est jusqu'à Khartoum dans la Haute Egypte (près de 4000 Km). C'est le seul prêtre catholique dans tout ce territoire.
Le Père Shall logea chez Mr et Mme Masoni pendant 6 mois, le temps de construire la sacristie. Il continua la construction de l'église qui sera très vite achevée grâce à la générosité des familles qui lançaient des souscriptions au fur et à mesure que les besoins se faisaient sentir. C'est le 21 juillet que l'église est officiellement ouverte pour le culte. Les dames provoquèrent une nouvelle souscription sans en parler au Père Shall parce qu'elles étaient mécontentes des "caisses de pétrole qui leur servaient de siège". Elles remirent au Père Shall 7600 Frs qui permirent de faire 18 bancs. Cette même année le Père Shall reçut la visite du Père Charton, Père Blanc de Ouagadougou. Lieutenant de réserve, il est aussi mobilisé Agadez de juin à août. C'est la première fois qu'Agadez recevait un prêtre pendant un temps aussi long.
1941 : Première visite des Pères Rédemptoristes
En janvier, le Père Shall entreprend un voyage à Birni N'Konni où un de ses confrères SMA est mobilisé : Le Père Lieutenant Sibenaler. Quelques mois plus tard, il descendra à Niamey pour visiter le Père Faroud. Le Père Constant Quillard, Rédemptoriste en poste à Alger, entreprend son voyage tant espéré et préparé vers le Niger à travers le Sahara pour "prospecter et préparer la fondation d'une mission chez les Noirs". "C'est un envoyé" officiel, et mandaté par les Supérieurs avec l'obligation de rendre compte, mais de ne pas traiter directement ni prendre d'engagement.
Le 2 mai à 8 h 30 le Père Constant Quillard arrive à Zinder après 3438 Km. La route fut longue : Alger-Laghouat-Ghardaia-El Goléa-In Salah-Tamanrasset-Agadez-Zinder. Il est accueilli très amicalement par le Père Faroud qui était en visite et par le Père Shall. "Le Père Faroud m'a mystifié". "Les deux Pères SMA avaient organisé une petite taquinerie au nouveau pour l'impressionner". Le Père Constant Quillard aura une conversation très intéressante avec les deux Pères SMA. Le Père Faroud propose Maradi comme possibilité d'implantation pour les Pères Rédemptoristes : "Ils s'accrochent à Maradi et veulent m'y accrocher". Monseigneur Parisot, Vicaire Apostolique de Ouidah avait par correspondance demandée, à l'insu du Père Faroud, au Père Quillard : "Acceptez-vous tout le Niger ?". Le propos est rapporté aux Pères Faroud et Shall. Ça jette un froid. Le Père Quillard notera dans son journalier : "Le Père Faroud! quelque chose est changé en lui, mais pourtant il est chic et connaît beaucoup de choses" Le Père Quillard restera quelques jours à Zinder qu'il découvrira avec étonnement : "300 européens, 3.000 soldats, 10.000 indigènes... Les habitants ont l'air sympathique, ils sont fortement islamisés mais beaucoup en surface".
Le Père Shall lui racontera des histoires de vieux missionnaires ou les limites du vrai et du faux sont difficiles à tracer. Une grande amitié naîtra entre le Père Quillard et le Père Shall. Ils auront une correspondance très suivie jusque dans leur vieillesse.
Le 11 mai, l'église de Zinder est remplie pour la fête de Sainte Jeanne d'Arc. Le Père Quillard prêche en rédemptoriste chevronné. Le Père Shall le présente à la population, au Sultan et à ses deux fils. Le 13 mai, Le Père Quillard très heureux de son séjour à Zinder, poursuit son voyage vers Niamey.
A Tessaoua, l'administrateur qui le reçoit l'interpelle vivement : "Vous venez prendre la place des Pères de la Société des Missions Africaines? ...vous pourriez prendre Zinder... " Le Père Shall n'est pas très apprécié par l'administrateur : "Je ne voulais pas avoir affaire à cet Anglais pour baptiser mon gosse", le Père Quillard se dirige vers Maradi en emportant les lunettes du Père Faroud qu'il avait oubliées chez l'administrateur. A Maradi, le Père Quillard prend des informations sur une éventuelle implantation de mission comme l'avait suggéré le Père Faroud.
Le 14 mai, le Père Quillard arrive à Dogondoutchi après les étapes de Madaoua et Birni N'Konni. Il aime Dogondoutchi comme il l'aimera toujours. "Je goûtais une joie, une paix extraordinaires. II me suffisait de savoir que j'étais sur le territoire de Dogondoutchi. Quelque chose me disait que ce serait le premier poste de mission, que je dresserais là ma première paillote".
Le lendemain vers 14 h 30, il arrive à Niamey où il est chaleureusement accueilli par le Père Faroud et le Père Lieutaud. "Je suis très étonné de constater que tout est ouvert dans la maison; tout le monde entre et passe partout et on ne vole pas... sauf les étrangers. Pourvu que ça dure!" Ça n'a pas duré! Le Père Quillard ne parle pas trop de l'objet de sa mission au Père Faroud qui a d'autres idées en tête".
Le 24 mai, le Père Quillard se rend à Ouagadougou. A Fada N'Gourma, il est reçu par le Père Chazal revenu à son poste après sa démobilisation : "Très fraternel et enjoué, tout le temps le mot pour rire". Il rencontre aussi le P. Brehier, SMA, compagnon du P Chazal, qui est à Diabo : "Ce jeune Père est entreprenant, a du mordant, sait déjà s'exprimer dans la langue des Mossis. Diabo deviendra certainement une mission pilote".
A Ouagadougou, il rencontre Mgr Thévénoud, vicaire Apostolique, qui lui apprend que "les Pères ont été pressentis pour prendre tout le Niger et en faire une Préfecture..." mais la proposition ne sera pas acceptée par Rome.
Le 30 juin, le Père Quillard arrive à Ouidah, pour prendre contact avec Mgr Parisot et s'en retournera en France, en passant à nouveau par Niamey. Le P. Quillard fera un rapport de soixante pages à son provincial pour le presser à commencer une implantation au Niger. Le Père Sibenaler, mobilisé à Birni Konni, fait une visite à Zinder avant de rejoindre son poste de mission : Kandi (Nord Dahomey).
La frontière entre le Niger et le Nigeria anglais est ''inexorablement" fermée, à cause de la guerre. Il n'y a plus d'échange entre le P. Shall de Zinder et ses confrères SMA Irlandais de Kano. Le Père Shall sera désormais seul à 940 km de la plus proche mission : Niamey. En septembre, il aura la joie de recevoir le P. Chazal de Fada N'Gourma, celui qui avait lancé deux ans auparavant la construction de l'église de Zinder. L'Adjudant Luigui, par un hasard de circonstance apporta au P. Shall, la statue de Sainte Thérèse de l'Enfant Jésus, patronne de la paroisse de Zinder. Elle sera placée au-dessus du maître-autel. (Aujourd'hui, elle est toujours a l'intérieur de l'Eglise.) Le P. Chazal reprend la route vers la France, en passant par Tamanrasset, pour ses congés.
1942 : Création de la Préfecture Apostolique de Niamey
Mgr Parisot, Vicaire Apostolique de Ouidah, arrive à Niamey pour célébrer la confirmation. Il rencontrera le P. Shall, de passage à Niamey.
Le 28 avril, un décret de la Congrégation de la Propagande publié par le Pape Pie XII, dans son audience, annonce la création de la Préfecture Apostolique de Niamey. Le P. Faroud en devient le Préfet Apostolique. C'est la surprise générale. Le P. Quillard, depuis Alger, attribua la rapidité de la décision romaine, à l'hésitation de ses supérieurs Rédemptoristes à s'investir au Niger. "On traîne, on hésite... Notre lenteur à nous décider nous a fermé peut-être les portes pour toujours". Le P. Quillard qui avait manifesté son mécontentement est appelé à Lyon par son Supérieur Provincial, le P. Duplex. Ils rencontrent tous les deux le P. Aupiais, Supérieur Provincial des SMA, qui leur déclare sa surprise et leur assure qu'il "n'est pour rien dans cette soudaine nomination". Le Père Aupiais reconnaît que le territoire est immense. Il regroupe tous les territoires cédés par : le Préfet Apostolique de Ghardaïa au Sahara (Algérie) pour la partie située au Nord du 20 ème parallèle; le Vicaire Apostolique de Ouagadougou (Burkinaactuel) pour Dori, Tillabéri, Agadez et Bilma; le Préfet Apostolique de Kaduna {Nigeria) pour Zinder, Diffa, N'Guigmi jusqu'au 15 ème parallèle; le Vicaire Apostolique du Dahomey (actuel Bénin) pour Fada N'Gourma, Diabo, Niamey, Dosso, Natitingou, Djougou, Parakou, Kandi; le Vicaire Apostolique de Khartoum (Soudan) pour un certain nombre de kilomètres carrés à peu près déserts le long de la frontière Est du Niger, entre le Tchad et la Libye.
La nouvelle Préfecture Apostolique est la troisième d'Afrique par l'étendue. Le Père Quillard s'écrira : "C'est incroyable! le Préfet n'a ni les moyens matériels ni le personnel pour administrer un pareil territoire". Le Père Aupiais, Supérieur Provincial SMA calme le Rédemptoriste, lui disant qu'"il y a place pour deux congrégations" mais la Congrégation de la Propagande ne revient pas sur ces décisions... et il faut attendre trois ou cinq ans pour demander un nouveau partage. C'est avec la conviction que "la Providence travaillait pour eux", que le Père Quillard et ses supérieurs décident de travailler au Niger sous la responsabilité de Monseigneur Faroud. Monseigneur Faroud est heureux de la création de la Préfecture Apostolique. Tout fondateur rêve que sa fondation prenne de l'importance. Certains pensaient qu'il avait fait intervenir des personnalités civiles, comme le chef de cabinet du Gouverneur de Niamey, auprès des instances romaines pour réaliser cette Préfecture. Monseigneur Parisot avouera qu'il pressa Rome, sur la demande du Père Faroud, en arguant que les Protestants "multipliaient les postes de mission" et, comme il fallait s'y attendre, Rome a "marché". Le Père Shall est nommé officiellement aumônier militaire de la garnison de Zinder avec un salaire non négligeable. Monseigneur Faroud, de son côté sera nommé aumônier pour tout le Niger avec comme adjoint le Père Lieutaud pour la garnison de Niamey et le Père Sibenaler pour la garnison de Kandi. "Ce fut une agréable nouvelle".
Le 15 septembre, Monseigneur Faroud reçoit un arrêté signé du Gouverneur du Niger pour l'ouverture d'une école à Fada N'Gourma. Dès le 4 décembre, les premières soeurs de Notre Dame des Apôtres arrivent à Fada sous la direction de mère Eléonora. Elles commencent l'école dans la maison des Pères.
1943
Le Père Lieutaud de Niamey monte à Zinder pour tenir compagnie au Père Shall qui n'a pas vu de confrère depuis mai 1942.
Monseigneur Faroud se rend en juillet à Zinder pour la confirmation. C'est la première célébration de confirmation à Zinder. Monseigneur ne restera pas longtemps. La guerre lui a mobilisé cinq prêtres et il assure lui-même tous les mois la messe à Kandi et à Parakou. Il reviendra tout de même en novembre à Zinder pour un séjour forcé. Une forte crise sciatique le clouera au lit avec de "fortes souffrances".
A Fada N'Gourma, l'école des soeurs, qui était dans la maison des Pères, intègre le bâtiment de l'école proprement dit qui peut accueillir 42 écoliers. Monseigneur Faroud voudrait développer cette école pour pouvoir accueillir au moins 168 élèves.
1944
Les soeurs de Fada N'Gourma ouvre une école libre de filles dont le recrutement a été difficile. Les filles métisses de l'orphelinat de Zinder arrivent à Fada N'Gourma pour être confiées aux soeurs. L'oeuvre qui jusqu'alors était sous la responsabilité administrative du Gouverneur, portera le nom de "Foyer de métisses de la Colonie du Niger". L'administration a construit un bâtiment à cet effet. Monseigneur Faroud ouvre officiellement la paroisse de Parakou. Le Père Roger Barthélémy, SMA, en est le curé.
Le 16 août, les soeurs de Notre Dame des Apôtres arrivent à Natitingou où elles sont accueillies par le Père Huchet, SMA, curé de la paroisse.
1946 : Arrivée de la première équipe des Pères Rédemptoristes
Les soeurs de Notre Dame des Apôtres s'installent à Djougou. Le Père Albert Mathieu quitte définitivement Fada N'Gourma. C'est l'arrivée officielle des Pères Rédemptoristes en novembre. Mgr Faroud, en accord avec le Père Quiîlard qui est le Supérieur des Rédemptoristes, affecte les nouveaux arrivants : Les Pères Goldbron et Cournault sont envoyés à Zinder pour faire communauté avec le Père Shall, SMA. Les Pères Jégu et Spicht sont envoyés à Fada N'Gourma pour faire communauté avec le Père ChazaL SMA, qui n'a pas encore rejoint sa nouvelle affectation. Le Père Lecomte reste à Niamey. Le Père Chazal qui refuse de rejoindre Fada est remplacé par le Père Quiîlard. A Fada, les Rédemptoristes sont seuls. Mgr Faroud est excédé par le comportement de son confrère qui ne fait qu'à sa tête : "Après cinq sommations, trois lettres et deux télégrammes, ce Père n'a pas encore obéi et a laissé la direction de la mission de Fada aux Pères Rédemptoristes, prétextant que cela marche bien ainsi. " Le Père Chazal avait tout de même écrit à son Préfet Apostolique : "Repliez-vous sur Parakou. Vous serez ainsi beau joueur et éviterez bien des frictions entre les membres de deux familles religieuses vivant dans les mêmes maisons qui sont trop transparentes... Notre vie de communauté déjà bien compromise devient inexistante en face des coutumes des Rédemptoristes et nos confrères risquent de se décourager".
Le Père Shall de Zinder remit les clefs de la maison et de l'église au Père Quillard en visite à Zinder et partit définitivement pour l'Europe après avoir donné 37 ans de vie à l'évangélisation. C'est le Père Baudu, 5NL qui prit sa succession.
Le Père Shall restera de coeur jusqu'à sa mort à Zinder "que je parcours dans mes rêves". Il écrivait régulièrement au Père Quillard. Dans une de ses lettres à 82 ans il écrivait à son "cher ami" : "Comme tous, je suis parti au pas de course vers ma chère Afrique voulant la convertir. Ah ! l'appétit de donner tout à Dieu que j'avais! Et après tant d'années de fièvres et de sueurs combien peu n'ai-je pas accompli. Il reste tant h faire après ce peu que nous avons pu accomplir. Dieu prend son temps, II a l'éternité tandis que nous, pauvres humains, voudrions voir le succès de nos entreprises. Est-ce que cela nous regarde si Dieu veut donner la grâce de la conversion à nos Noirs dans un ou deux siècles seulement. Tout ce qui nous importe, c'est de les encourager à suivre nos exemples dans le service de Dieu. Il ne manquera pas d'appeler les gens quand nous les aurons préparés".
1947 : Arrivée des premières religieuses ‘de Notre Dame des Apôtres’ à Zinder
En avril, Monseigneur, sentant la nécessité d'une communauté de soeurs pour Zinder pour la tenue d'une école et pour soigner les malades qui "n'osent se présenter au dispensaire", commence les pourparlers avec Soeur Eugénia, Supérieure Générale des soeurs de Notre Dame des Apôtres.
Les premières religieuses de la congrégation arrivent à Zinder le 21 août. Soeur Eléonora Carozzi (Italienne) et sa communauté seront les premières religieuses à s'implanter au Niger. Soeur Eléonora a déjà une grande expérience de l'Afrique. Elle fut fondatrice et organisatrice de la communauté des soeurs de Fada N'Gourma. Partageant la même spiritualité que les Pères des Missions Africaines, elles se donneront totalement à la naissance de l'Eglise. Elles logent dans une petite case "vrai Bethléem" sans fenêtres ni meubles... Les Zindérois musulmans les regardent avec "curiosité". Elles seront vite baptisées : "femmes marabouts". Elles auront de très bonnes relations avec le Sultan qui leur offre un petit coin de son palais pour soigner les malades. Petit à petit, dans des conditions matérielles très limitées, elles s'adapteront avec beaucoup de courage à la cité zindéroise. A Noël, devant la crèche elles feront cette belle prière avec beaucoup d'humour : "Petit Jésus, cette année nous avons besoin de 10 kg de patience, 50 kg de bonne humeur, 70 kg d'humilité, le tout adouci par un peu de chocolat". Pas de chocolat mais le Sultan leur offrira deux bouteilles de miel.
Les soeurs de Zinder ouvrent officiellement une école le 7 avril. " Notre apatam construit en hâte est un peu bas, il faut courber Véchine pour y entrer et nos élèves sont assis sur des briques. Le tableau est un morceau de gros carton. Qu'importe! c'est le début!"
Le Père Baudu à Zinder a des problèmes de cohabitation avec ses deux confrères Rédemptoristes. Il écrit une lettre de lamentations à Mgr Faroud qui comprend la situation. "Mettez-vous à sa place. Il doit commander à trois confrères d'une autre société religieuse, bien plus âgés que lui". Seul le Père Viaud, supérieur de Niamey se réjouit de travailler avec ses deux vicaires Rédemptoristes dont l'un surtout "jeune, plein d'esprit, et de gaieté, est pour lui un excellent confrère et bon camarade". Les relations entre les deux congrégations religieuses s'enveniment. Les uns se considèrent comme les anciens "qui ont fait" et les autres, les nouveaux "a qui Rome a promis le territoire du Niger". Les premiers freinent, les derniers accélèrent... Tous aiment passionnément cette terre du Niger et veulent en être les maîtres pour proclamer la Bonne Nouvelle de Jésus. Les Pères des Missions Africaines savent déjà officieusement qu'ils doivent partir dans la Nouvelle Préfecture Apostolique de Parakou et les Pères Rédemptoristes savent qu'ils devront rester.
Mgr Faroud très attaché à "son cher Niamey" écrira à Mgr Constantini, Secrétaire Général de la Propangande, pour lui faire part de la possibilité d'un autre découpage territorial. Les Pères Rédemptoristes prendraient de Dogondoutchi à N'guigmi avec le siège de la Préfecture à Zinder et les Pères des Missions Africaines resteraient de Dosso à Dori en gardant le siège de Niamey, Mgr Faroud avancera de nombreuses raisons matérielles, spirituelles, missionnaires et même celles qui émanent de son peuple : "Je passe sous silence à dessein, Excellence, toutes les réflexions, remarques et commentaires, entendues de la bouche des Européens, fonctionnaires et civils, plus ou moins scandalisés de voir des missionnaires qu'ils connaissent bien, qui durant de longues années ont versé leur sueur sur un terrain, laisser la place à d'autres qui n'y ont rien fait. On me fait remarquer, malgré mes explications, que l'on voit créer de nouvelles divisions religieuses, mais que jamais on avait vu quelqu'un chassé de son poste pour laisser place à un autre et garder seulement un petit coin ingrat de son territoire. Je ne puis employer les termes plus énergiques dont on se sert autour de moi... J'ai cru de mon devoir de dire toutes ces choses à votre Excellence. Qu'elle veuille bien m'excuser de ma franchise. J'ai simplement voulu lui donner des précisions qui ne pouvaient lui venir que d'ici". D'ici, de là bas ou de l'ailleurs, Rome restera ferme sur son découpage territorial.
Les Pères Rédemptoristes s'opposaient aussi à Mgr Faroud pour les nominations. Mgr Faroud avait ouvert un poste de mission chez les Mossis à Diabo où "le Père Bréhier, un Père des Missions Africaines, travaille exactement comme si nous devions toujours rester dans le pays. Je viens de lui envoyer des fonds pour ouvrir une école de catéchistes que les Pères Rédemptoristes n'auront qu'à continuer. Ce Père est seul A 50 km de là, à Fada, ils sont trois. J'ai donc demandé à l'un des deux Pères Rédemptoristes, à celui qui apprend la langue mossi de se rendre à Diabo pour qu'il y ait deux Pères dans chaque poste et qu'il prenne les consignes pour le jour où il devra remplacer le Supérieur actuel, mais on m'a répondu qu'étant religieux ils ne pouvaient se séparer et demeurer seuls avec un Père des Missions Africaines".
La situation se complique. Les Pères des Missions Africaines, non religieux, ne comprennent pas ces exigences internes alors que celles de la mission paraissent évidentes : "II est inutile de rester à 3 dans une station, quand il n'y a de travail que pour un ou deux, et qu'il y a des postes voisins où se trouve un seul missionnaire".
Mgr Faroud se rend à Tanguieta (Dahomey) rencontrer le Père Chazal qui refusait d'aller à Fada. Aux reproches de Mgr Faroud, "le pape de l'Atacora" comme il sera nommé par les populations de cette région, répondra durement : "Je n'ai pas pu surmonter la peine de retourner pour quelques mois à Fada où je me suis dévoué pendant 10 ans et où j'ai tout créé : église, école, stations secondaires, village chrétien, etc, et maintenant vous passez tout cela à d'autres qui pour nous sont des étrangers". Dans son rapport, Mgr Faroud écrira : "En fait il a manqué d'esprit surnaturel".
Le Père Mathieu, le dernier supérieur SMA de Fada, m'a rapporté la colère de Mgr Faroud pour la désobéissance du Père Chazal. H aurait même demandé au curé de Natitingou, le Père Huchet, de lui signifier qu'il était "suspens a divinis". Le Père Huchet ne lui dira rien. J'ai eu l'honneur de participer aux funérailles du Père Chazal à Cotiakou au Bénin en présence des plus hautes autorités béninoises qui ont voulu rendre un hommage mérité à un grand homme resté missionnaire jusqu'au "fond de son cœur". Suite à l'affaire Chazal, Le Père Quillard reprochera à Mgr Faroud sa maladresse et "sa déficience totale, incapable de se faire obéir par ses sujets". Mgr Faroud écrira à Rome pour dire que ses relations avec le Père Quillard se dégradent de jour en jour : "Le Père Quillard m'a fait parvenir à Niamey, une lettre abominable, cynique, tendancieuse et en certains endroits mensongère (je pèse mes mots...) Il me dit qu'a Niamey, il n'a fait qu'un baptême, un enterrement, et donné une bénédiction; que le jeune Père Rédemptoriste s'occupe de la sacristie, coule des cires et fait à l'occasion garde puits. Ce dernier point, absolument faux, a amené des protestations chez le Père en question". De nombreuses lettres de ce type attestent la dégradation des relations entre eux. Mgr Faroud presse Rome pour la création d'une nouvelle Préfecture Apostolique. Mgr Faroud demandera au Père Quillard de fonder la mission de Dogondoutchi. Il y arrivera le 10 avril. La paillote-chapelle sera vite construite (14 mètres de long et 5 mètres de large).
Le Père Quillard sera bien accueilli et accepté dans toute la région par les chefs qui lui permettront de faire le catéchisme sur la place des villages. La chapelle sera bénie le 4 août.
1943
Mgr Faroud écrit au Père Quillard, supérieur des Rédemptoristes, d'envoyer un confrère pour fonder la mission de Maradi. Le Père Quillard n'avait pas beaucoup de personnel mais promit qu'un Père de Zinder desservirait de temps en temps Maradi.
Le départ des Pères de la Société des Missions Africaines
Le 28 juin le Père Baudu reçoit un télégramme de Mgr Faroud : "Nouvelle Préfecture Parakou Passez service 30 juin et venez Niamey avec matériel'. La préfecture Apostolique de Niamey est donc à la charge des Pères Rédemptoristes à partir du 1er juillet. Le Père Constant Quillard devient le deuxième Préfet Apostolique de Niamey. Le Père Baudu prépare ses bagages en quelques heures et rejoint ses confrères des Missions Africaines dans la Nouvelle Préfecture Apostolique de Parakou. La légende a beaucoup dit sur les conditions de son départ de Zinder mais la vérité historique retiendra ce que le Père Baudu écrivait en partant : « Que les Très Saints Cœurs de Jésus et de Marie fassent aux deux Pères Rédemptoristes la grâce de voir la mission progresser pour la plus grande gloire de Dieu. »
Plus tard, en 1950, Mgr Faroud de Nikki écrira à Mgr Quillard : "Le Père Baudu n'a rien emporté de Zinder. Les indigènes n'ont rien donné à la mission en fait de matériel et le Père Shall lui a bien indiqué ce qu'il pouvait emporter lui appartenant à lui-même ou à Monsieur Lauroy. Il faut être très discret sur cette question car si vous écoutez les doléances des gens qui n'ont rien à y voir, je pourrais remplir une grande page de réflexions que j'ai entendues pendant près d'un an de la bouche des Européens qui vraiment ne comprenaient pas. Je devrais chaque fois prendre la défense des remplaçants. Ce qu'il a emporté sert à meubler sa chambre et la sacristie. En arrivant à Nikki, il n'avait même pas de terrain. Il a dû construire sa maison et son église dont j'achève la couverture".
Mgr Faroud devient le premier Préfet Apostolique de Parakou. Il rejoint la ville du Haut Dahomey avec tous ses confrères en laissant toute la place à Mgr Constant Quillard et aux fils de Saint Alphonse pour continuer l'œuvre missionnaire au Niger. Dans sa retraite, Mgr Faroud répondait à un journaliste qui lui posait la question : "Avez-vous eu du chagrin, Monseigneur, de quitter cette Préfecture Apostolique de Niamey où vous aviez œuvré avec foi et courage ?" "Oui, c'est le cœur bien gros, que les Pères des Missions Africaines durent quitter les stations qu'ils avaient fondées et où ils avaient peiné pendant plusieurs années, d'autant qu'au rebours de ce qui se passe habituellement dans la création de nouvelles missions religieuses, c'était les anciens qui laissaient tout, pour aller faire du neuf, et c'était des nouveaux qui prenaient ce qui existait..."
Mgr Berlier, Rédemptoriste, premier Evêque de Niamey a rendu hommage à Mgr François Faroud au jour de sa mort le 5 septembre 1963... : "Ce deuil touche profondément tous nos confrères du diocèse de Niamey, tous les chrétiens du Niger et aussi de nombreux musulmans de Niamey parmi lesquels il a toujours gardé de fidèles amis. Il avait gardé pour le Niger une grande place dans son coeur. Si aujourd'hui le Niger s'ouvre à l'Evangile, si nous avons des chrétiens et des jeunes séminaristes haoussa et germa, nous n'oublierons jamais qu'il fut le pionnier dans cet immense territoire".
En 1976, lorsque Mgr Berlier demanda aux Pères des Missions Africaines de revenir au Niger, le Père Billet, Rédemptoriste s'adressait à Mgr Faroud : « Cher Monseigneur, vous avez dû sourire et vous réjouir quand vous avez vu, du haut du ciel, vos confrères revenir pour prêter cette fois main forte aux Rédemptoristes du Niger".
J'emprunte la conclusion de cette page d'histoire au Père Jean-Marie Favier, SMA, qui écrivait en 1960 dans "Les Échos des Missions Africaines" au jour de la célébration des 50 ans de sacerdoce de Mgr François Faroud : "Un jour viendra, et Dieu fasse que ce jour ne soit pas trop éloigné, où les uns et les autres s'en iront. C'est que l'Eglise aura grandie, qu'elle pourra se suffire à elle-même : ainsi sera couronné l'édifice auquel tous les missionnaires auront aidé h poser le fondement".
Ici s'arrête le temps des labours et commence le temps des semailles.
SOMMAIRE
1919 : Première visite à Zinder
1927 : Première visite à Dosso
1927 : Première visite à Niamey
1930 : Première visite à Dogondoutchi
1931 : L'Église plante sa tente au Niger
1933 : Inauguration de l'église de Niamey
1934 : Deuxième visite à Dogondoutchi
1935 : Premiers baptêmes d'adultes
1936 : Visite romaine à Zinder
1938 : Rencontre d'Antoine Douramane avec le Père Faroud à Niamey
1938 : Projet de Préfecture Apostolique à Niamey
1940 : L'église de Zinder est ouverte
1941 : Première visite des Pères Rédemptonstes
1942 : Création de la Préfecture Apostolique de Niamey
1946 : Arrivée de la première équipe des Pères Rédemptonstes
1947 : Arrivée des premières religieuses de Notre Dame des Apôtres à Zinder
1948 : Le départ des Pères de la Société des Missions Africaines
Le Temps des Labours, Les origines du l'Église Catholique au Niger (1919-1948)
Mgr. Michel CARTATÉGUY
08 Décembre 2003
La carte géographique religieuse du Niger de cette époque n'est pas celle que nous connaissons aujourd'hui. Zinder est rattaché à la Prefecture Apostolique de Shedam au Nigeria. Niamey fait partie du Vicariat Apostolique de Ouidah au Dahomey d'alors, actuel Bénin. Agadez est relié au Vicariat Apostolique de Khartoum (Soudan. Shedam et Ouidah sont sous la juridiction des Pères de la Société des Missions Africaines et Khartoum sous celle des Pères Comboniens.
En 1911, Monseigneur Oswald Waller, SMA, devient Préfet Apostolique de Shedam (Nigeria. Le jour de sa nomination à Shedam, il avait promis : "je voudrais préparer les voies du Seigneur en prêchant l'Évangile le long des routes jusqu'à Zinder". En 1919, il est en visite à Kano. La population de Zinder lui fait savoir son intention de le recevoir dans le Damagaram (Zinder). Cet Alsacien, robuste et de grande taille, prend alors la route de Zinder avec une très grande joie, réalisant ainsi ses propres promesses. Parlant parfaitement le haussa, il n’a aucune difficulté à entrer en relation avec les habitants de Zinder qui lui demandent d'ouvrir rapidement une mission dans leur ville. Il passera une semaine à Zinder. "C'est en mai 1919 que Zinder eut la première visite d'un prêtre catholique".
Mgr Waller écrira au très Révérend Supérieur Général de la Société des Missions Africaines: "Il faut que je m'en aille vite, sans quoi je céderai à la tentation de vivre et de mourir sur les sables brûlants de Zinder. Le thermomètre monte très haut ici, mais comme la chaleur est sèche, on la supporte très bien."
1925
Le 3 mai 1925, la mission catholique de Kano est inaugurée. Zinder s'y rattache comme station secondaire. Le Père Alphonse Shall, SMA, fidèle collaborateur de Mgr Waller depuis 1909 devient curé de 10. C'est à ce titre qu'il visitera Zinder dès novembre 5. La population européenne le presse d'ouvrir une mission catholique "... mais on ne pouvait pas disperser petites forces, on n'avait que trois missionnaires". Le Père Shall promet aux Zinderois de venir chaque année.
1926
Zinder est à cette époque depuis de nombreuses années "Chef-lieu" du "Territoire militaire du Niger". Ce territoire deviendra "Colonie" par la volonté du gouvernement général de l'Afrique Occidentale Française D.F.). Niamey, plus proche de la côte que Zinder, deviendra la métropole de la Colonie. Les principaux : centres de la Colonie sont à cette date : Zinder avec 5.900 habitants et Matankari avec 6.300 habitants. Les rapports officiels ne parlent guère de Niamey qui n'est qu'un petit village de pêcheurs, mais qui prendra de plus en plus importance.
1927
Monseigneur Waller, Préfet Apostolique de Shedam donne sa démission. Le Père Shall est nommé Pro préfet de la Préfecture Apostolique du Nigeria Oriental.
1936 : Visite romaine à Zinder
Zinder recevra un prêtre venant de Rome en inspection. Le Révérend Père Joseph Capra, professeur de Géographie Pratique à l'Université, va vivement critiquer le Père Shall, curé de Kano (Nigeria) qui n'avait pas encore envoyé un prêtre en permanence à Zinder. Cet étranger "en tournée de vacances voyageant gratis 1 ère classe" ignorait que la paroisse de Kano était plus grande que la France et qu'elle n'avait que deux prêtres seulement.
Depuis sa maison de retraite, le Père Shall qui n'a jamais digéré ces remarques romaines écrivait : "J'avais à visiter trente neuf paroisses, quatre fois par an et l'autre confrère le Père Eugène Sirlinger venait d'ouvrir onze écoles... il les visita tous les quinze jours, certaines écoles étaient à cent quatre vingt kilomètres de Kano. Il y creva bon nombre de chevaux, s'y usa jusqu'à la corde... puis nous vient un gros, gras, court prêtre de Rome pour nous dire qu'on ne fait rien. Merci du compliment".
Le Père Maxime Chazal, prêtre de la Société des Missions Africaines est nommé au Vicariat Apostolique de Ouidah pour la mission de Fada N'Gourma où il arrivera le 7 décembre. Il a fondé les missions d'Anécho et de Mango au Togo. C'est le premier prêtre résidant à Fada N'Gourma. Le Père Faroud se réjouit d'avoir un voisin même s'il est à 300 Km, il se sent moins seul. En 1898, des prêtres de la Société des Pères Blancs avaient séjourné à Fada N'Gourma pendant six mois dont le Père Yacouba, ami fidèle du Père Faroud dans sa vieillesse. Ils quittèrent bien vite la ville gourma lorsqu'ils se rendirent compte qu'il n'étaient pas dans leur territoire. Ce territoire était confié aux Pères des Missions Africaines. Ils se retirèrent dans le leur, à Ouagadougou. Le Père Slaterry, Supérieur Général SMA, écrit en décembre au Cardinal Fumasoni pour remettre officiellement la "demande d'une Préfecture Apostolique qui porterait le nom de Niamey".
Le Père Slaterry avait déjà choisi le nom du futur Préfet Apostolique. Il le présente pour confirmation au Cardinal avec beaucoup de diplomatie : "Nous avons indiqué celui que, tout bien considéré, nous préférons, laissant en toute soumission le choix définitif à la Sacrée Congrégation de la Propagande". Le Père Slaterry profite de cette même lettre pour demander le rattachement de Zinder à la nouvelle "future" Préfecture Apostolique de Niamey.
1939
Le 1er janvier, le Père Quillard, Rédemptoriste reçoit la visite de son Provincial à Alger avec qui il met au point son voyage à travers l'Afrique noire. Il contacte les intéressés : Mgr Nouet à Ghardala, Père Shall à Zinder, Père Faroud à Niamey, Père Chazal à Fada N'Gourma, Mgr Thévénoud à Ouagadougou, Mgr Parisot à Ouidah. "Le Niger appartenait à tous ces chefs de missions... il faudrait ajouter Khartoum mais impossible de l'atteindre". Le 2 septembre à minuit,"un fou : Hitler" déclare la guerre à toute l'Europe. Les Anglais rentrent en guerre le 3 septembre à 11 heures et les Français à 17 heures.
C'est le début de la deuxième guerre mondiale. Le Père Chazal est convoqué à Niamey. Lieutenant de réserve, il est affecté à Zinder. "La guerre arrive. Je suis déjà vieux mais mon titre d'officier de réserve me vaut de reprendre l'uniforme." La population de Zinder se réjouit de l'arrivée du prêtre-officier et voudrait tout de suite une église et une mission. Le Père Maxime Chazal lance par circulaire un appel pressant à la population européenne pour collecter les fonds nécessaires à la construction de l'église. En parlant de Sainte Thérèse de l'Enfant Jésus, patronne de la future mission de Zinder, il écrivit : "Celle que nous appelons la petite fleur, nos amis les Anglais : The Little Flower, le pape défunt : ma petite sainte, toute l'Eglise ; La Patronne des missions, cette aimable sainte, si invoquée par nos soldats pendant la guerre 1914-1918 et qui s'incline à nouveau vers eux dans la présente guerre, aura, grâce à nos petits sacrifices, un sanctuaire à Zinder, face au grand Sahara. Nous y viendrons le dimanche, prier pour nos soldats, pour ceux qui ne sont pas encore dans la lumière et nous en sortirons nous-mêmes, meilleurs et réconfortés. Nous y viendrons aussi, un jour prochain, y chanter le TE DEUM de la Victoire".
Le Père Lieutenant Chazal, malheureusement ne restera pas longtemps à Zinder. Il sera affecté par les autorités militaires à Niamey. Zinder n'a plus de prêtre. La population, loin de se décourager, écrira au Supérieur Général de la Société des Missions Africaines : "Le Père Chazal, sur la demande des catholiques de la ville de Zinder, européens et indigènes, militaires et civils, a choisi un endroit pour la construction d'une église. Il a ouvert une souscription qui avait déjà recueilli 6.000 Frs. Au mois d'octobre, les briques et les bois de coquaire sont à pied d'oeuvre avec des poutres métalliques. L'église pourra être construite à Noël. Il a tout notifié au Père Shall pour le transmettre au Préfet Apostolique de Kaduna".
Le Supérieur Général SMA, le Père Slattery, très touché par la mobilisation des Zindérois écrira en anglais au Père Shall de bien vouloir se mettre à l'oeuvre de Zinder. Il écrivait en même temps au Préfet Apostolique de Kaduna, Mgr Thomas Hugues de "bien vouloir céder ce Père".
1940 : L'église de Zinder est ouverte
Le Père Shall qui parlait français fut tout désigné pour aller à Zinder et y rester. C'est le 1er janvier qu'il fit ses adieux à ses paroissiens de Kano et il quitta ce territoire auquel l'attachaient tant de souvenirs chers à sa vie missionnaire.
Monseigneur Hugues, Préfet Apostolique, lui souhaita avec un beau sourire : "bon courage et la bénédiction du ciel". Il lui donna tout de même une pierre d'autel pour célébrer la messe et un vieil ornement blanc. "Voilà pour commencer... de l'argent je n'en ai point, usez de vos ressources et de votre imagination". C'est en pleine deuxième guerre mondiale que le Père Shall arrive à Zinder, heureux de recommencer à écrire une autre page de sa vie missionnaire : "Malgré mes trente et un an de mission, on me fit l'honneur d'en être le bâtisseur". Zinder ainsi que Myrriah et Tessaoua abritaient, à l'époque, beaucoup de soldats français dont certains de très bons chrétiens et "beaucoup d'autres, hélas, très indifférents. Chose étrange, les uns et les autres, surtout les derniers m'aidèrent de leur mieux. En France, ils n'avaient pas estimé le Bon Dieu, mais ici, dans ces immensités, dans ces vastes espaces, ils sentirent leur coeur se serrer d'inquiétude et cherchaient de la consolation dans le christianisme et dans l'assistance à la sainte messe". Deux officiers de Myrriah deviendront, par la suite, prêtres.
Rome avait donné au Père Shall, juridiction ordinaire jusqu'à El Goléa au Nord (2500 Km) en Algérie et à l'Est jusqu'à Khartoum dans la Haute Egypte (près de 4000 Km). C'est le seul prêtre catholique dans tout ce territoire.
Le Père Shall logea chez Mr et Mme Masoni pendant 6 mois, le temps de construire la sacristie. Il continua la construction de l'église qui sera très vite achevée grâce à la générosité des familles qui lançaient des souscriptions au fur et à mesure que les besoins se faisaient sentir. C'est le 21 juillet que l'église est officiellement ouverte pour le culte. Les dames provoquèrent une nouvelle souscription sans en parler au Père Shall parce qu'elles étaient mécontentes des "caisses de pétrole qui leur servaient de siège". Elles remirent au Père Shall 7600 Frs qui permirent de faire 18 bancs. Cette même année le Père Shall reçut la visite du Père Charton, Père Blanc de Ouagadougou. Lieutenant de réserve, il est aussi mobilisé Agadez de juin à août. C'est la première fois qu'Agadez recevait un prêtre pendant un temps aussi long.
1941 : Première visite des Pères Rédemptoristes
En janvier, le Père Shall entreprend un voyage à Birni N'Konni où un de ses confrères SMA est mobilisé : Le Père Lieutenant Sibenaler. Quelques mois plus tard, il descendra à Niamey pour visiter le Père Faroud. Le Père Constant Quillard, Rédemptoriste en poste à Alger, entreprend son voyage tant espéré et préparé vers le Niger à travers le Sahara pour "prospecter et préparer la fondation d'une mission chez les Noirs". "C'est un envoyé" officiel, et mandaté par les Supérieurs avec l'obligation de rendre compte, mais de ne pas traiter directement ni prendre d'engagement.
Le 2 mai à 8 h 30 le Père Constant Quillard arrive à Zinder après 3438 Km. La route fut longue : Alger-Laghouat-Ghardaia-El Goléa-In Salah-Tamanrasset-Agadez-Zinder. Il est accueilli très amicalement par le Père Faroud qui était en visite et par le Père Shall. "Le Père Faroud m'a mystifié". "Les deux Pères SMA avaient organisé une petite taquinerie au nouveau pour l'impressionner". Le Père Constant Quillard aura une conversation très intéressante avec les deux Pères SMA. Le Père Faroud propose Maradi comme possibilité d'implantation pour les Pères Rédemptoristes : "Ils s'accrochent à Maradi et veulent m'y accrocher". Monseigneur Parisot, Vicaire Apostolique de Ouidah avait par correspondance demandée, à l'insu du Père Faroud, au Père Quillard : "Acceptez-vous tout le Niger ?". Le propos est rapporté aux Pères Faroud et Shall. Ça jette un froid. Le Père Quillard notera dans son journalier : "Le Père Faroud! quelque chose est changé en lui, mais pourtant il est chic et connaît beaucoup de choses" Le Père Quillard restera quelques jours à Zinder qu'il découvrira avec étonnement : "300 européens, 3.000 soldats, 10.000 indigènes... Les habitants ont l'air sympathique, ils sont fortement islamisés mais beaucoup en surface".
Le Père Shall lui racontera des histoires de vieux missionnaires ou les limites du vrai et du faux sont difficiles à tracer. Une grande amitié naîtra entre le Père Quillard et le Père Shall. Ils auront une correspondance très suivie jusque dans leur vieillesse.
Le 11 mai, l'église de Zinder est remplie pour la fête de Sainte Jeanne d'Arc. Le Père Quillard prêche en rédemptoriste chevronné. Le Père Shall le présente à la population, au Sultan et à ses deux fils. Le 13 mai, Le Père Quillard très heureux de son séjour à Zinder, poursuit son voyage vers Niamey.
A Tessaoua, l'administrateur qui le reçoit l'interpelle vivement : "Vous venez prendre la place des Pères de la Société des Missions Africaines? ...vous pourriez prendre Zinder... " Le Père Shall n'est pas très apprécié par l'administrateur : "Je ne voulais pas avoir affaire à cet Anglais pour baptiser mon gosse", le Père Quillard se dirige vers Maradi en emportant les lunettes du Père Faroud qu'il avait oubliées chez l'administrateur. A Maradi, le Père Quillard prend des informations sur une éventuelle implantation de mission comme l'avait suggéré le Père Faroud.
Le 14 mai, le Père Quillard arrive à Dogondoutchi après les étapes de Madaoua et Birni N'Konni. Il aime Dogondoutchi comme il l'aimera toujours. "Je goûtais une joie, une paix extraordinaires. II me suffisait de savoir que j'étais sur le territoire de Dogondoutchi. Quelque chose me disait que ce serait le premier poste de mission, que je dresserais là ma première paillote".
Le lendemain vers 14 h 30, il arrive à Niamey où il est chaleureusement accueilli par le Père Faroud et le Père Lieutaud. "Je suis très étonné de constater que tout est ouvert dans la maison; tout le monde entre et passe partout et on ne vole pas... sauf les étrangers. Pourvu que ça dure!" Ça n'a pas duré! Le Père Quillard ne parle pas trop de l'objet de sa mission au Père Faroud qui a d'autres idées en tête".
Le 24 mai, le Père Quillard se rend à Ouagadougou. A Fada N'Gourma, il est reçu par le Père Chazal revenu à son poste après sa démobilisation : "Très fraternel et enjoué, tout le temps le mot pour rire". Il rencontre aussi le P. Brehier, SMA, compagnon du P Chazal, qui est à Diabo : "Ce jeune Père est entreprenant, a du mordant, sait déjà s'exprimer dans la langue des Mossis. Diabo deviendra certainement une mission pilote".
A Ouagadougou, il rencontre Mgr Thévénoud, vicaire Apostolique, qui lui apprend que "les Pères ont été pressentis pour prendre tout le Niger et en faire une Préfecture..." mais la proposition ne sera pas acceptée par Rome.
Le 30 juin, le Père Quillard arrive à Ouidah, pour prendre contact avec Mgr Parisot et s'en retournera en France, en passant à nouveau par Niamey. Le P. Quillard fera un rapport de soixante pages à son provincial pour le presser à commencer une implantation au Niger. Le Père Sibenaler, mobilisé à Birni Konni, fait une visite à Zinder avant de rejoindre son poste de mission : Kandi (Nord Dahomey).
La frontière entre le Niger et le Nigeria anglais est ''inexorablement" fermée, à cause de la guerre. Il n'y a plus d'échange entre le P. Shall de Zinder et ses confrères SMA Irlandais de Kano. Le Père Shall sera désormais seul à 940 km de la plus proche mission : Niamey. En septembre, il aura la joie de recevoir le P. Chazal de Fada N'Gourma, celui qui avait lancé deux ans auparavant la construction de l'église de Zinder. L'Adjudant Luigui, par un hasard de circonstance apporta au P. Shall, la statue de Sainte Thérèse de l'Enfant Jésus, patronne de la paroisse de Zinder. Elle sera placée au-dessus du maître-autel. (Aujourd'hui, elle est toujours a l'intérieur de l'Eglise.) Le P. Chazal reprend la route vers la France, en passant par Tamanrasset, pour ses congés.
1942 : Création de la Préfecture Apostolique de Niamey
Mgr Parisot, Vicaire Apostolique de Ouidah, arrive à Niamey pour célébrer la confirmation. Il rencontrera le P. Shall, de passage à Niamey.
Le 28 avril, un décret de la Congrégation de la Propagande publié par le Pape Pie XII, dans son audience, annonce la création de la Préfecture Apostolique de Niamey. Le P. Faroud en devient le Préfet Apostolique. C'est la surprise générale. Le P. Quillard, depuis Alger, attribua la rapidité de la décision romaine, à l'hésitation de ses supérieurs Rédemptoristes à s'investir au Niger. "On traîne, on hésite... Notre lenteur à nous décider nous a fermé peut-être les portes pour toujours". Le P. Quillard qui avait manifesté son mécontentement est appelé à Lyon par son Supérieur Provincial, le P. Duplex. Ils rencontrent tous les deux le P. Aupiais, Supérieur Provincial des SMA, qui leur déclare sa surprise et leur assure qu'il "n'est pour rien dans cette soudaine nomination". Le Père Aupiais reconnaît que le territoire est immense. Il regroupe tous les territoires cédés par : le Préfet Apostolique de Ghardaïa au Sahara (Algérie) pour la partie située au Nord du 20 ème parallèle; le Vicaire Apostolique de Ouagadougou (Burkinaactuel) pour Dori, Tillabéri, Agadez et Bilma; le Préfet Apostolique de Kaduna {Nigeria) pour Zinder, Diffa, N'Guigmi jusqu'au 15 ème parallèle; le Vicaire Apostolique du Dahomey (actuel Bénin) pour Fada N'Gourma, Diabo, Niamey, Dosso, Natitingou, Djougou, Parakou, Kandi; le Vicaire Apostolique de Khartoum (Soudan) pour un certain nombre de kilomètres carrés à peu près déserts le long de la frontière Est du Niger, entre le Tchad et la Libye.
La nouvelle Préfecture Apostolique est la troisième d'Afrique par l'étendue. Le Père Quillard s'écrira : "C'est incroyable! le Préfet n'a ni les moyens matériels ni le personnel pour administrer un pareil territoire". Le Père Aupiais, Supérieur Provincial SMA calme le Rédemptoriste, lui disant qu'"il y a place pour deux congrégations" mais la Congrégation de la Propagande ne revient pas sur ces décisions... et il faut attendre trois ou cinq ans pour demander un nouveau partage. C'est avec la conviction que "la Providence travaillait pour eux", que le Père Quillard et ses supérieurs décident de travailler au Niger sous la responsabilité de Monseigneur Faroud. Monseigneur Faroud est heureux de la création de la Préfecture Apostolique. Tout fondateur rêve que sa fondation prenne de l'importance. Certains pensaient qu'il avait fait intervenir des personnalités civiles, comme le chef de cabinet du Gouverneur de Niamey, auprès des instances romaines pour réaliser cette Préfecture. Monseigneur Parisot avouera qu'il pressa Rome, sur la demande du Père Faroud, en arguant que les Protestants "multipliaient les postes de mission" et, comme il fallait s'y attendre, Rome a "marché". Le Père Shall est nommé officiellement aumônier militaire de la garnison de Zinder avec un salaire non négligeable. Monseigneur Faroud, de son côté sera nommé aumônier pour tout le Niger avec comme adjoint le Père Lieutaud pour la garnison de Niamey et le Père Sibenaler pour la garnison de Kandi. "Ce fut une agréable nouvelle".
Le 15 septembre, Monseigneur Faroud reçoit un arrêté signé du Gouverneur du Niger pour l'ouverture d'une école à Fada N'Gourma. Dès le 4 décembre, les premières soeurs de Notre Dame des Apôtres arrivent à Fada sous la direction de mère Eléonora. Elles commencent l'école dans la maison des Pères.
1943
Le Père Lieutaud de Niamey monte à Zinder pour tenir compagnie au Père Shall qui n'a pas vu de confrère depuis mai 1942.
Monseigneur Faroud se rend en juillet à Zinder pour la confirmation. C'est la première célébration de confirmation à Zinder. Monseigneur ne restera pas longtemps. La guerre lui a mobilisé cinq prêtres et il assure lui-même tous les mois la messe à Kandi et à Parakou. Il reviendra tout de même en novembre à Zinder pour un séjour forcé. Une forte crise sciatique le clouera au lit avec de "fortes souffrances".
A Fada N'Gourma, l'école des soeurs, qui était dans la maison des Pères, intègre le bâtiment de l'école proprement dit qui peut accueillir 42 écoliers. Monseigneur Faroud voudrait développer cette école pour pouvoir accueillir au moins 168 élèves.
1944
Les soeurs de Fada N'Gourma ouvre une école libre de filles dont le recrutement a été difficile. Les filles métisses de l'orphelinat de Zinder arrivent à Fada N'Gourma pour être confiées aux soeurs. L'oeuvre qui jusqu'alors était sous la responsabilité administrative du Gouverneur, portera le nom de "Foyer de métisses de la Colonie du Niger". L'administration a construit un bâtiment à cet effet. Monseigneur Faroud ouvre officiellement la paroisse de Parakou. Le Père Roger Barthélémy, SMA, en est le curé.
Le 16 août, les soeurs de Notre Dame des Apôtres arrivent à Natitingou où elles sont accueillies par le Père Huchet, SMA, curé de la paroisse.
1946 : Arrivée de la première équipe des Pères Rédemptoristes
Les soeurs de Notre Dame des Apôtres s'installent à Djougou. Le Père Albert Mathieu quitte définitivement Fada N'Gourma. C'est l'arrivée officielle des Pères Rédemptoristes en novembre. Mgr Faroud, en accord avec le Père Quiîlard qui est le Supérieur des Rédemptoristes, affecte les nouveaux arrivants : Les Pères Goldbron et Cournault sont envoyés à Zinder pour faire communauté avec le Père Shall, SMA. Les Pères Jégu et Spicht sont envoyés à Fada N'Gourma pour faire communauté avec le Père ChazaL SMA, qui n'a pas encore rejoint sa nouvelle affectation. Le Père Lecomte reste à Niamey. Le Père Chazal qui refuse de rejoindre Fada est remplacé par le Père Quiîlard. A Fada, les Rédemptoristes sont seuls. Mgr Faroud est excédé par le comportement de son confrère qui ne fait qu'à sa tête : "Après cinq sommations, trois lettres et deux télégrammes, ce Père n'a pas encore obéi et a laissé la direction de la mission de Fada aux Pères Rédemptoristes, prétextant que cela marche bien ainsi. " Le Père Chazal avait tout de même écrit à son Préfet Apostolique : "Repliez-vous sur Parakou. Vous serez ainsi beau joueur et éviterez bien des frictions entre les membres de deux familles religieuses vivant dans les mêmes maisons qui sont trop transparentes... Notre vie de communauté déjà bien compromise devient inexistante en face des coutumes des Rédemptoristes et nos confrères risquent de se décourager".
Le Père Shall de Zinder remit les clefs de la maison et de l'église au Père Quillard en visite à Zinder et partit définitivement pour l'Europe après avoir donné 37 ans de vie à l'évangélisation. C'est le Père Baudu, 5NL qui prit sa succession.
Le Père Shall restera de coeur jusqu'à sa mort à Zinder "que je parcours dans mes rêves". Il écrivait régulièrement au Père Quillard. Dans une de ses lettres à 82 ans il écrivait à son "cher ami" : "Comme tous, je suis parti au pas de course vers ma chère Afrique voulant la convertir. Ah ! l'appétit de donner tout à Dieu que j'avais! Et après tant d'années de fièvres et de sueurs combien peu n'ai-je pas accompli. Il reste tant h faire après ce peu que nous avons pu accomplir. Dieu prend son temps, II a l'éternité tandis que nous, pauvres humains, voudrions voir le succès de nos entreprises. Est-ce que cela nous regarde si Dieu veut donner la grâce de la conversion à nos Noirs dans un ou deux siècles seulement. Tout ce qui nous importe, c'est de les encourager à suivre nos exemples dans le service de Dieu. Il ne manquera pas d'appeler les gens quand nous les aurons préparés".
1947 : Arrivée des premières religieuses ‘de Notre Dame des Apôtres’ à Zinder
En avril, Monseigneur, sentant la nécessité d'une communauté de soeurs pour Zinder pour la tenue d'une école et pour soigner les malades qui "n'osent se présenter au dispensaire", commence les pourparlers avec Soeur Eugénia, Supérieure Générale des soeurs de Notre Dame des Apôtres.
Les premières religieuses de la congrégation arrivent à Zinder le 21 août. Soeur Eléonora Carozzi (Italienne) et sa communauté seront les premières religieuses à s'implanter au Niger. Soeur Eléonora a déjà une grande expérience de l'Afrique. Elle fut fondatrice et organisatrice de la communauté des soeurs de Fada N'Gourma. Partageant la même spiritualité que les Pères des Missions Africaines, elles se donneront totalement à la naissance de l'Eglise. Elles logent dans une petite case "vrai Bethléem" sans fenêtres ni meubles... Les Zindérois musulmans les regardent avec "curiosité". Elles seront vite baptisées : "femmes marabouts". Elles auront de très bonnes relations avec le Sultan qui leur offre un petit coin de son palais pour soigner les malades. Petit à petit, dans des conditions matérielles très limitées, elles s'adapteront avec beaucoup de courage à la cité zindéroise. A Noël, devant la crèche elles feront cette belle prière avec beaucoup d'humour : "Petit Jésus, cette année nous avons besoin de 10 kg de patience, 50 kg de bonne humeur, 70 kg d'humilité, le tout adouci par un peu de chocolat". Pas de chocolat mais le Sultan leur offrira deux bouteilles de miel.
Les soeurs de Zinder ouvrent officiellement une école le 7 avril. " Notre apatam construit en hâte est un peu bas, il faut courber Véchine pour y entrer et nos élèves sont assis sur des briques. Le tableau est un morceau de gros carton. Qu'importe! c'est le début!"
Le Père Baudu à Zinder a des problèmes de cohabitation avec ses deux confrères Rédemptoristes. Il écrit une lettre de lamentations à Mgr Faroud qui comprend la situation. "Mettez-vous à sa place. Il doit commander à trois confrères d'une autre société religieuse, bien plus âgés que lui". Seul le Père Viaud, supérieur de Niamey se réjouit de travailler avec ses deux vicaires Rédemptoristes dont l'un surtout "jeune, plein d'esprit, et de gaieté, est pour lui un excellent confrère et bon camarade". Les relations entre les deux congrégations religieuses s'enveniment. Les uns se considèrent comme les anciens "qui ont fait" et les autres, les nouveaux "a qui Rome a promis le territoire du Niger". Les premiers freinent, les derniers accélèrent... Tous aiment passionnément cette terre du Niger et veulent en être les maîtres pour proclamer la Bonne Nouvelle de Jésus. Les Pères des Missions Africaines savent déjà officieusement qu'ils doivent partir dans la Nouvelle Préfecture Apostolique de Parakou et les Pères Rédemptoristes savent qu'ils devront rester.
Mgr Faroud très attaché à "son cher Niamey" écrira à Mgr Constantini, Secrétaire Général de la Propangande, pour lui faire part de la possibilité d'un autre découpage territorial. Les Pères Rédemptoristes prendraient de Dogondoutchi à N'guigmi avec le siège de la Préfecture à Zinder et les Pères des Missions Africaines resteraient de Dosso à Dori en gardant le siège de Niamey, Mgr Faroud avancera de nombreuses raisons matérielles, spirituelles, missionnaires et même celles qui émanent de son peuple : "Je passe sous silence à dessein, Excellence, toutes les réflexions, remarques et commentaires, entendues de la bouche des Européens, fonctionnaires et civils, plus ou moins scandalisés de voir des missionnaires qu'ils connaissent bien, qui durant de longues années ont versé leur sueur sur un terrain, laisser la place à d'autres qui n'y ont rien fait. On me fait remarquer, malgré mes explications, que l'on voit créer de nouvelles divisions religieuses, mais que jamais on avait vu quelqu'un chassé de son poste pour laisser place à un autre et garder seulement un petit coin ingrat de son territoire. Je ne puis employer les termes plus énergiques dont on se sert autour de moi... J'ai cru de mon devoir de dire toutes ces choses à votre Excellence. Qu'elle veuille bien m'excuser de ma franchise. J'ai simplement voulu lui donner des précisions qui ne pouvaient lui venir que d'ici". D'ici, de là bas ou de l'ailleurs, Rome restera ferme sur son découpage territorial.
Les Pères Rédemptoristes s'opposaient aussi à Mgr Faroud pour les nominations. Mgr Faroud avait ouvert un poste de mission chez les Mossis à Diabo où "le Père Bréhier, un Père des Missions Africaines, travaille exactement comme si nous devions toujours rester dans le pays. Je viens de lui envoyer des fonds pour ouvrir une école de catéchistes que les Pères Rédemptoristes n'auront qu'à continuer. Ce Père est seul A 50 km de là, à Fada, ils sont trois. J'ai donc demandé à l'un des deux Pères Rédemptoristes, à celui qui apprend la langue mossi de se rendre à Diabo pour qu'il y ait deux Pères dans chaque poste et qu'il prenne les consignes pour le jour où il devra remplacer le Supérieur actuel, mais on m'a répondu qu'étant religieux ils ne pouvaient se séparer et demeurer seuls avec un Père des Missions Africaines".
La situation se complique. Les Pères des Missions Africaines, non religieux, ne comprennent pas ces exigences internes alors que celles de la mission paraissent évidentes : "II est inutile de rester à 3 dans une station, quand il n'y a de travail que pour un ou deux, et qu'il y a des postes voisins où se trouve un seul missionnaire".
Mgr Faroud se rend à Tanguieta (Dahomey) rencontrer le Père Chazal qui refusait d'aller à Fada. Aux reproches de Mgr Faroud, "le pape de l'Atacora" comme il sera nommé par les populations de cette région, répondra durement : "Je n'ai pas pu surmonter la peine de retourner pour quelques mois à Fada où je me suis dévoué pendant 10 ans et où j'ai tout créé : église, école, stations secondaires, village chrétien, etc, et maintenant vous passez tout cela à d'autres qui pour nous sont des étrangers". Dans son rapport, Mgr Faroud écrira : "En fait il a manqué d'esprit surnaturel".
Le Père Mathieu, le dernier supérieur SMA de Fada, m'a rapporté la colère de Mgr Faroud pour la désobéissance du Père Chazal. H aurait même demandé au curé de Natitingou, le Père Huchet, de lui signifier qu'il était "suspens a divinis". Le Père Huchet ne lui dira rien. J'ai eu l'honneur de participer aux funérailles du Père Chazal à Cotiakou au Bénin en présence des plus hautes autorités béninoises qui ont voulu rendre un hommage mérité à un grand homme resté missionnaire jusqu'au "fond de son cœur". Suite à l'affaire Chazal, Le Père Quillard reprochera à Mgr Faroud sa maladresse et "sa déficience totale, incapable de se faire obéir par ses sujets". Mgr Faroud écrira à Rome pour dire que ses relations avec le Père Quillard se dégradent de jour en jour : "Le Père Quillard m'a fait parvenir à Niamey, une lettre abominable, cynique, tendancieuse et en certains endroits mensongère (je pèse mes mots...) Il me dit qu'a Niamey, il n'a fait qu'un baptême, un enterrement, et donné une bénédiction; que le jeune Père Rédemptoriste s'occupe de la sacristie, coule des cires et fait à l'occasion garde puits. Ce dernier point, absolument faux, a amené des protestations chez le Père en question". De nombreuses lettres de ce type attestent la dégradation des relations entre eux. Mgr Faroud presse Rome pour la création d'une nouvelle Préfecture Apostolique. Mgr Faroud demandera au Père Quillard de fonder la mission de Dogondoutchi. Il y arrivera le 10 avril. La paillote-chapelle sera vite construite (14 mètres de long et 5 mètres de large).
Le Père Quillard sera bien accueilli et accepté dans toute la région par les chefs qui lui permettront de faire le catéchisme sur la place des villages. La chapelle sera bénie le 4 août.
1943
Mgr Faroud écrit au Père Quillard, supérieur des Rédemptoristes, d'envoyer un confrère pour fonder la mission de Maradi. Le Père Quillard n'avait pas beaucoup de personnel mais promit qu'un Père de Zinder desservirait de temps en temps Maradi.
Le départ des Pères de la Société des Missions Africaines
Le 28 juin le Père Baudu reçoit un télégramme de Mgr Faroud : "Nouvelle Préfecture Parakou Passez service 30 juin et venez Niamey avec matériel'. La préfecture Apostolique de Niamey est donc à la charge des Pères Rédemptoristes à partir du 1er juillet. Le Père Constant Quillard devient le deuxième Préfet Apostolique de Niamey. Le Père Baudu prépare ses bagages en quelques heures et rejoint ses confrères des Missions Africaines dans la Nouvelle Préfecture Apostolique de Parakou. La légende a beaucoup dit sur les conditions de son départ de Zinder mais la vérité historique retiendra ce que le Père Baudu écrivait en partant : « Que les Très Saints Cœurs de Jésus et de Marie fassent aux deux Pères Rédemptoristes la grâce de voir la mission progresser pour la plus grande gloire de Dieu. »
Plus tard, en 1950, Mgr Faroud de Nikki écrira à Mgr Quillard : "Le Père Baudu n'a rien emporté de Zinder. Les indigènes n'ont rien donné à la mission en fait de matériel et le Père Shall lui a bien indiqué ce qu'il pouvait emporter lui appartenant à lui-même ou à Monsieur Lauroy. Il faut être très discret sur cette question car si vous écoutez les doléances des gens qui n'ont rien à y voir, je pourrais remplir une grande page de réflexions que j'ai entendues pendant près d'un an de la bouche des Européens qui vraiment ne comprenaient pas. Je devrais chaque fois prendre la défense des remplaçants. Ce qu'il a emporté sert à meubler sa chambre et la sacristie. En arrivant à Nikki, il n'avait même pas de terrain. Il a dû construire sa maison et son église dont j'achève la couverture".
Mgr Faroud devient le premier Préfet Apostolique de Parakou. Il rejoint la ville du Haut Dahomey avec tous ses confrères en laissant toute la place à Mgr Constant Quillard et aux fils de Saint Alphonse pour continuer l'œuvre missionnaire au Niger. Dans sa retraite, Mgr Faroud répondait à un journaliste qui lui posait la question : "Avez-vous eu du chagrin, Monseigneur, de quitter cette Préfecture Apostolique de Niamey où vous aviez œuvré avec foi et courage ?" "Oui, c'est le cœur bien gros, que les Pères des Missions Africaines durent quitter les stations qu'ils avaient fondées et où ils avaient peiné pendant plusieurs années, d'autant qu'au rebours de ce qui se passe habituellement dans la création de nouvelles missions religieuses, c'était les anciens qui laissaient tout, pour aller faire du neuf, et c'était des nouveaux qui prenaient ce qui existait..."
Mgr Berlier, Rédemptoriste, premier Evêque de Niamey a rendu hommage à Mgr François Faroud au jour de sa mort le 5 septembre 1963... : "Ce deuil touche profondément tous nos confrères du diocèse de Niamey, tous les chrétiens du Niger et aussi de nombreux musulmans de Niamey parmi lesquels il a toujours gardé de fidèles amis. Il avait gardé pour le Niger une grande place dans son coeur. Si aujourd'hui le Niger s'ouvre à l'Evangile, si nous avons des chrétiens et des jeunes séminaristes haoussa et germa, nous n'oublierons jamais qu'il fut le pionnier dans cet immense territoire".
En 1976, lorsque Mgr Berlier demanda aux Pères des Missions Africaines de revenir au Niger, le Père Billet, Rédemptoriste s'adressait à Mgr Faroud : « Cher Monseigneur, vous avez dû sourire et vous réjouir quand vous avez vu, du haut du ciel, vos confrères revenir pour prêter cette fois main forte aux Rédemptoristes du Niger".
J'emprunte la conclusion de cette page d'histoire au Père Jean-Marie Favier, SMA, qui écrivait en 1960 dans "Les Échos des Missions Africaines" au jour de la célébration des 50 ans de sacerdoce de Mgr François Faroud : "Un jour viendra, et Dieu fasse que ce jour ne soit pas trop éloigné, où les uns et les autres s'en iront. C'est que l'Eglise aura grandie, qu'elle pourra se suffire à elle-même : ainsi sera couronné l'édifice auquel tous les missionnaires auront aidé h poser le fondement".
Ici s'arrête le temps des labours et commence le temps des semailles.
SOMMAIRE
1919 : Première visite à Zinder
1927 : Première visite à Dosso
1927 : Première visite à Niamey
1930 : Première visite à Dogondoutchi
1931 : L'Église plante sa tente au Niger
1933 : Inauguration de l'église de Niamey
1934 : Deuxième visite à Dogondoutchi
1935 : Premiers baptêmes d'adultes
1936 : Visite romaine à Zinder
1938 : Rencontre d'Antoine Douramane avec le Père Faroud à Niamey
1938 : Projet de Préfecture Apostolique à Niamey
1940 : L'église de Zinder est ouverte
1941 : Première visite des Pères Rédemptonstes
1942 : Création de la Préfecture Apostolique de Niamey
1946 : Arrivée de la première équipe des Pères Rédemptonstes
1947 : Arrivée des premières religieuses de Notre Dame des Apôtres à Zinder
1948 : Le départ des Pères de la Société des Missions Africaines
Le Temps des Labours, Les origines du l'Église Catholique au Niger (1919-1948)
Mgr. Michel CARTATÉGUY
08 Décembre 2003